Moussa Maaskri raconte son OM
Photos : Marc-Antoine Serra pour Vice FR

FYI.

This story is over 5 years old.

témoignage

Moussa Maaskri raconte son OM

Alors que la Ligue 1 reprend ce soir au Vélodrome, l'acteur franco-algérien, connu pour ses rôles de voyous, raconte son histoire d'amour avec l'Olympique de Marseille, club qu'il supporte depuis qu'il est arrivé dans la cité phocéenne à l'âge de 5 ans.

Sa carrure imposante, sa gueule cassée et son regard noir flippant sont bien connus des cinéphiles français. Moussa Maaskri a enchaîné les rôles de voyous sur le grand écran – Truands, MR 73, Banlieue 13 ­– et ça lui va plutôt bien, lui qui a débuté sa carrière d’artiste sur les planches. Né en 1962 en Algérie, à Constantine, Moussa Maaskri est arrivé à Marseille cinq ans plus tard. Très vite, son quotidien est rythmé par les matches de l’Olympique de Marseille. Comme tous les habitants de la cité phocéenne, Moussa Maaskri est fan de l’OM. Pour VICE, il témoigne de sa relation avec un club pas comme les autres. Un club qui fait vibrer en bien ou en mal une ville toute entière.

Publicité

***

« Quand je suis venu en France avec ma mère pour rejoindre mon père, qui était arrivé quelques années plus tôt, j’ai vécu dans un bidonville, dans le quartier de la Sauvagère. Et ce bidonville n’était pas situé très loin du Stade Vélodrome. Moi, je jouais au foot dans l’équipe du quartier des Flamands, mais j’allais voir l’OM le plus souvent possible.

Je me souviens qu’à l’époque, c’était gratuit pour les enfants de moins de 10 ans accompagnés par un adulte. Alors, avec les potes, on allait au stade et on demandait à des grands de nous faire rentrer. On était installés sur des gradins en béton et les spectateurs venaient avec des coussins « OM » pour que ce soit plus confortable. Le stade, c’était l’endroit où on venait voir jouer Roger Magnusson, Josip Skoblar, Charly Loubet, Victor Zvunka, ou encore les deux champions du monde brésiliens Paulo Cesar et Jaïrzinho. Mais c’était aussi un lieu où on jouait au foot, à la mi-temps, en bas des tribunes. Il y avait toujours quelqu’un qui venait avec son ballon. Le foot, on a ça dans le sang à Marseille… C’est comme Saint-Etienne, ça respire le foot, du matin au café, jusqu’au soir après le dîner. Quand l’OM gagne, la ville va bien. Quand il perd, les gens sont touchés. C’est comme ça.

« Chris Waddle était extraordinaire. Il n’avait pas l’air d’un footballeur, avec sa dégaine et sa démarche, mais il a inventé des gestes fantastiques »

Publicité

J’ai aimé l’OM quand il gagnait des titres. J’ai continué à l’aimer quand il est descendu en Ligue 2, en 1980. On avait pourtant une équipe avec beaucoup d’internationaux : Marius Trésor, Didier Six, Marc Berdoll, le Suédois Anders Linderoth… Pendant quatre ans, on a connu la Ligue 2, avec certains matches délocalisés dans le petit stade de l’Huveaune. C’était long, mais on savait que l’OM allait remonter, avec une équipe de minots en plus : Jean-Charles De Bono, José Anigo, Éric Di Meco, Marcel De Falco… Je me souviens du match de la montée, contre Toulouse, dans un Vélodrome plein à ras-bord et une ambiance comme on n’en voit nulle part ailleurs. Puis, deux ans plus tard, Bernard Tapie est arrivé. Il a très vite compris la ville, les gens, leur mentalité. Et il connaissait le foot. Il a recruté Jean-Pierre Papin, un mec qui jouait au FC Bruges et qu’on ne connaissait pas. Papin, avant qu'il flambe, il a eu du mal au début. Bernard Tapie avait compris qu’il fallait mettre des moyens pour avoir une belle équipe. Il l’a fait en recrutant Karl-Heinz Förster, Enzo Francescoli, Chris Waddle… Ce dernier était extraordinaire. Il n’avait pas l’air d’un footballeur, avec sa dégaine et sa démarche, mais il a inventé des gestes fantastiques. Moi, quand j’allais voir les matches au Vélodrome, je changeais de tribune à la mi-temps pour le voir de plus près.

Marseille a toujours aimé les joueurs qui font le spectacle et Tapie l’avait bien compris. C’est pour cela, qu’ici, il est intouchable. Avec lui, on a gagné la Ligue des champions en 1993 face au Milan AC de Berlusconi. Un trophée que certains sont venus remplir de merde, avec l’affaire VA-OM. Ok, il y a eu une décision de justice, mais, depuis, l’OM a toujours une image de voleur et suscite souvent la suspicion. Beaucoup de gens ont une image très exagérée de Marseille : une ville sale et des habitants qui parlent trop fort. On ne nous pardonne pas grand-chose et ça fait du mal à l’OM. Quand j’entends dire que beaucoup de joueurs ne viennent pas ici à cause de l’environnement du club, qu’ils ont peur… Oui, il y a des excès, de la passion, des erreurs de faites, mais les joueurs ont envie de venir à Marseille, parce que c’est une ville de foot. Regardez Florian Thauvin : il vient une première fois, ça ne marche pas. Il part en Angleterre, mais veut absolument revenir pour montrer ce qu’il vaut. Et quelle saison il vient de faire ! Peut-être que pour venir ici, il faut des épaules, c’est vrai.

L’OM n’a pas les moyens du Paris Saint-Germain. Pendant des années, Robert Louis-Dreyfus a dépensé beaucoup d’argent. Il aimait le club, mais il n’a pas eu les résultats espérés. Après sa mort en 2009, sa femme Margarita a rapidement voulu vendre. L’Américain Frank McCourt est arrivé il y a près d'un an avec son projet, l'OM Champions Project. Ce n’est pas forcément flashy, mais cela se construit doucement, intelligemment. Bien sûr qu’on aimerait avoir beaucoup plus d’argent et avoir Neymar ou Kylian Mbappé…

Mais Mc Court sait où il va. Il a fait venir Rudi Garcia, un entraîneur qui veut réussir à Marseille. On vient de faire une belle saison, avec cette finale de Ligue Europa et la quatrième place en championnat. Les choses se mettent en place. On va être patient. L’OM améliore son image. Il a développé des partenariats avec des clubs dans les quartiers. Quand j’étais gamin, l’OM, c’était un peu le club inaccessible, le club des bourges. Moi, je crois en ce projet.Il me plaît, il est structuré, cohérent. On a fait venir Luiz Gustavo, un mec qui méritait de faire la Coupe du monde avec le Brésil. On a fait venir Dimitri Payet. On a besoin de noms, de grands joueurs. Marseille a toujours aimé ça ! »