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Sports

Les courses de rues, un jeu dangereux

Des courses de Formula E au Grand Prix de Monaco en F1, les sports auto s'invitent de plus en plus en ville, pour des courses plus périlleuses.

Cet article fait partie du programme e-Generation,_ réalisé _en partenariat avec Renault.

Les courses de voitures ont commencé dans les rues. Avant les circuits de pointe d'aujourd'hui, les combinaisons climatisées des pilotes et les bouteilles de champagne super chères, les membres les plus sauvages de nos sociétés, ceux qui brûlaient d'un désir de vitesse et de danger, prenaient leurs véhicules, allaient sur les routes, et faisaient la course.

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Parfois c'était légal, parfois moins. Pour la plupart de ces compétiteurs, cela n'avait pas d'importance, la nature illicite de ce qu'ils étaient en train de faire faisait partie du charme.

Et on ne parle pas seulement de marginaux : dites le nom d'une discipline de course automobile respectable de nos jours et vous avez toutes les chances qu'elle ait démarré dans les rues. La course la plus iconique de la Formule 1 reste le Grand Prix de Monaco, qui se déroule tous les ans dans les rues de ce parc à milliardaires qu'est la principauté. Mais auparavant, les autres courses se déroulaient aussi sur des routes publiques à travers la France.

Quand on parle d'origines crapuleuses, les championnats NASCAR se posent là. Pendant la Prohibition, les contrebandiers transportaient leur gnôle illégale dans des voitures rapides et agiles, de celles qui pouvaient larguer la police qui se lançait à leurs trousses. En plus de leur goût pour l'alcool, ils avaient aussi un goût pour la vitesse. Au fil du temps, ces courses-poursuites sont devenues des courses de stock-car - et ce que nous connaissons aujourd'hui comme le NASCAR.

Aujourd'hui, la course de rue se retrouve à peu près dans tous les sports mécaniques : F1, Formula E, voitures de tourisme… Citez-moi une compétition, et il y aura forcément une course qui se déroule, au moins en partie, sur des routes publiques dans l'année. C'est une sorte de tradition, comme le système de coupes au football ou les victoires de Serena Williams au tennis.

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Mais si cela fait partie du décor désormais, cela ne veut pas dire que le danger n'est plus présent. Alors que les circuits sont devenus des environnements de plus en plus sûrs - et on ne s'en plaindra pas - les circuits de route restent encore terrifiants. Il n'y a pas de zone de dégagement, la surface est pleine de bosses, et tout a l'air d'aller beaucoup plus vite. C'est un peu la folie.

Le risque semble beaucoup plus réel à la fois pour les pilotes et les spectateurs. Sur un circuit standard, les barrières se trouvent loin de la piste. Sur un circuit de ville, les compétiteurs les frôlent à chaque virage. A la moindre erreur, le pilote peut se retrouver dans les barrières en un rien de temps. Et ça doit faire mal.

Mais l'erreur peut aussi ne pas venir du pilote. Si la voiture connaît un quelconque problème, ce sera directement l'accident. Ou si le mec derrière lui n'en a rien à faire de la sécurité, ça peut finir pareil.

Visuellement, c'est aussi beaucoup plus attrayant qu'une course sur un circuit - qui n'est en vérité qu'un grand champ recouvert de tarmac. La vue des maisons qui passent les unes après les autres, des panneaux de signalisation, des marques au sol, c'est autre chose quand même. Quand les voitures roulent sur des circuits de rues, ils traversent les mêmes routes sur lesquelles vous ou moi pourrions rouler. Ils vont juste beaucoup plus vite que votre Laguna.

C'est pour ça qu'ils sont considérés comme les meilleurs circuits. Beaucoup de gens estiment que les vrais champions sont ceux qui dévoilent leurs aptitudes de pur-sang sur ces circuits de centres-villes. En F1, les pilotes qui ont gagné à Monaco sont considérés comme la crème de la crème. Ayrton Senna a remporté six fois le Grand Prix monégasque, un record, alors que Michael Schumacher l'a gagné cinq fois et Alain Prost, quatre. Trois des meilleurs pilotes de tous les temps. Ce n'est pas une coïncidence.

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Senna courait comme un dieu à Monaco. Mais même lui pouvait être pris en défaut par la piste. En 1988, il se crashe alors qu'il a une confortable avance et donne la victoire à Prost, son ennemi juré. Senna fut tellement perturbé qu'il s'enferme alors dans son appartement (qui ne se trouvait pas loin du circuit, on est dans un circuit de ville, rappelez-vous) et ne communique pas avec son équipe pendant plusieurs heures. Senna se jurera après coup qu'on ne l'y reprendrait plus et gagnera tous les Grand Prix de Monaco jusqu'à sa mort en 1994.

Cet incident ajoute du charme au Grand Prix de Monaco. On pouvait se dire que si quelqu'un comme Senna pouvait se foirer autant, les autres, de simples mortels, auraient bien de la peine sur ce circuit. Demandez aux pilotes : ils vous diront tous qu'une victoire à Monaco n'a pas la même saveur qu'une victoire sur n'importe quel autre circuit.

Tout le monde n'apprécie pas les subtilités de Monaco ceci dit. Nelson Piquet, trois fois champion du monde, n'en était pas très fan. « C'est comme essayer de faire du vélo au milieu de ton salon », a déclaré une fois le Brésilien à propos de la course. Mais c'est peut-être parce qu'il ne l'a jamais gagnée…

Son fils, Nelson Piquet Jr., a beaucoup plus de succès sur les circuits en ville. Mais il y a aussi connu l'horreur. En 2008, on lui a donné l'ordre de se crasher intentionnellement durant la course de Singapour, afin que son coéquipier chez Renault, Fernando Alonso, remporte la victoire. Ces manigances ont été révélées au grand public par la suite, et ce fut la fin de la carrière en Formule 1 de Piquet Jr.

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Mais il a aussi connu la rédemption sur ces circuits : il y a gagné son premier championnat de Formula E la saison dernière, un tour de force qui impliquait onze courses sur des circuits en ville. Toutes les courses de Formula E se déroulent en centre-ville, la compétition tout-électrique tentant de montrer l'intérêt de cette technologie dans un environnement urbain. C'est bien pour le côté écolo, mais aussi pour ceux qui apprécient les courses de rues.

Nelson Jr a remporté les courses de Long Beach et de Moscou et a décroché le titre, à un point près, à Londres, où la course tournait autour de Battersea Park. La Formula E offre un terrain de chasse idéal aux pilotes qui ne font pas de détails sur les circuits en ville. Ses principaux protagonistes jusqu'ici (Piquet, Sebastien Buemi et Lucas di Grassi) sont clairement à l'aise entre les barrières et sur les routes bosselées.

Mais ce sont peut-être des circuits qui devraient être réservés aux pilotes expérimentés ceci dit. Voilà ce qui s'est passé lors de la toute première course de Formula E l'an dernier à Pékin, quand Nick Heidfeld a tenté un dépassement sur Nicolas Prost dans le dernier virage de la course.

Mais le pire du pire dans les courses de rues, c'est quand les motos s'invitent. Là, les blessures sérieuses et la mort ne sont jamais loin.

Dans la Snaefell Mountain Course par exemple, qui comprend à la fois le Tourist Trophy de l'Île de Man et le Grand Prix de Manx. Les deux sont des courses de motos légendaires et populaires, mais le circuit ultra-rapide qui fait le tour de la montagne peut parfois être horriblement dangereux. Cette année, trois coureurs sont morts (un dans le Tourist Trophy, deux dans le GP de Manx). Dix-sept pilotes s'y sont tués sur les cinq dernières années.

C'est énorme et cela confirme le danger incroyable que peut représenter la course sur route et dans les rues, mais aussi l'intérêt toujours grandissant de ces événements. Qu'autant de gens continuent de s'inscrire à ces compétitions alors qu'elles pourraient très bien signer leur arrêt de mort démontre bien les qualités addictives de la course sur route. Et tant qu'ils sont heureux de le faire, qui sommes-nous pour les en empêcher ? Ils font très clairement partie d'un autre monde.