Mario Cipollini, le bourreau des cœurs du peloton

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Mario Cipollini, le bourreau des cœurs du peloton

Durant toute sa carrière, Super Mario a construit sa légende de diva du peloton en se forgeant un palmarès aussi brillant que ses choix vestimentaires étaient discutables.

Nous sommes en octobre 2002, sur le circuit de Zolder, en Belgique. Habituellement réservé aux courses automobiles, il est transformé ce jour-là en théâtre du championnat du monde de cyclisme. Plat comme la main, le circuit laisse forcément la part belle aux sprinteurs. Alors que l'emballage final se profile, une violente chute vient éventrer le peloton lancé à pleine vitesse vers l'arrivée. Pas de quoi perturber Mario Cipollini, parfaitement emmené par son train de fidèles, de gregarii dévoués à sa cause. Agé de 36 ans, le Toscan devient champion du monde et parachève magnifiquement sa plus belle saison de coureur cycliste. En l'espace de seulement quelques mois, l'idole de ces dames va enfin triompher sur Milan-San Remo, course qui s'est longtemps refusée à lui ainsi que sur la semi-classique flamande Gent-Wevelgem, brillamment gagnée. Pour couronner le tout, il va également, dans sa tenue zébrée si caractéristique de son équipe d'alors, Acqua & Sapone, lever les bras à six reprises sur le Giro. Une année quasi-parfaite en somme.

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Drôle de zèbre. Photo Flickr via Buhduh

On l'aura compris, Mario Cipollini est l'un des coureurs les plus doués de sa génération et l'un des sprinteurs les plus emblématiques de la riche histoire du cyclisme, comme il semble le revendiquer lui-même : « J'ai commencé à gagner en 1989, lors de ma première saison comme professionnel, et j'ai continué jusqu'en 2004. » Si ce genre de déclarations zlatanesques peuvent le ranger dans la catégories des flagorneurs, il faut bien avouer que le palmarès deSuper Mario parle pour lui. En plus de cette magique année 2002, le Toscan peut se targuer d'une sacrée ribambelle de victoires : 42 victoires sur le Giro, 3 Gent-Wevelgem et même 12 étapes du Tour de France (dont quatre à la suite en 1999, record à battre).

Au total, plus d'une centaine de victoires en quinze ans de carrière. Sa relation tumultueuse avec la Grande Boucle reste, pour les amateurs de cyclisme, un grand regret. Réputé pour ne pas passer un pont d'autoroute, il avait pour habitude d'abandonner dès les premiers reliefs montagneux. Une attitude qui a vite lassé Jean-Marie Leblanc, directeur de la course d'alors, qui décide à plusieurs reprises de na pas inviter l'équipe de l'Italien. Véxé, Cipollini a annoncé à plusieurs reprises sa retraite sportive : « J'ai reçu beaucoup du cyclisme, mais moins que ce que j'ai donné ».

SuperMario, tout en discrétion. Photo Flickr via Anders

Il faut dire que Mario Cipollini est tout sauf un caractère facile. S'il n'hésite pas à remercier ses coéquipiers pour ses victoires comme lors du mondial 2002 : « Nous avions créé une équipe dévouée et parfaite », ses dérapages lui coûtent parfois cher. Lors du Tour d'Espagne 1994, l'Italien va être purement et simplement balancé dans les barrières par son coéquipier d'alors, Adriano Baffi. Si Cipollini assure que Baffi « n'a pas pu faire exprès », de nombreuses rumeurs courent dans le peloton. La principale : le poisson-pilote aurait voulu se venger des caprices de star de son leader. Un mal pour un bien puisqu'après quelques jours à l'hôpital, il ressort avec des dents toutes neuves, marque de fabrique de son sourire ravageur.

Dix ans plus tard, c'est sur Gent-Wevelgem que l'Italien va à nouveau s'illustrer. Irrité par un commissaire de course à moto qui a l'outrecuidance de le frotter et d'un peu trop klaxonner, Cipo répond avec deux beaux lancers de bidons en sa direction. Résultat : une mise hors course alors que la victoire était encore jouable pour la diva du peloton.

Cipo ou mec guez ? Photo Flickr via vectorbug

Mais on lui pardonne tout à Super Mario. Véritable bête médiatique, il s'est très rapidement mis dans la poche les tifosis italiens en manque de sensations fortes depuis quelques années. Mieux encore, sa belle gueule, son allure (plus d'1m90 !) et sa gouaille légendaire ont attiré un nouveau public féminin sur le bord des routes. Playboy assumé, Mario Cipollini sait y faire lorsqu'il faut jouer de sa personne. Affublé de nombreux surnoms (Super Mario, Cipo, Il Rei Leone…), il est la vraie star du cyclisme d'alors. C'est lui, le premier à avoir porté un ensemble jaune sur les routes du Tour de France. Pratique illégale mais tolérée, elle lui donnait une allure solaire. Ce n'est d'ailleurs pas la seule excentricité vestimentaire qu'il va se permettre. Lors de son passage chez Saeco, il va participer à plusieurs étapes du Tour avec un cuissard siglé du drapeau américain. Lors d'un prologue du Giro au Vatican, il porte une combinaison aux couleurs de l'état du pape. Une autre fois encore, il arbore une très seyante combinaison « muscle », qui redessine tout son corps.

Malgré ce portrait, tomber dans le cliché de l'italien dragueur et vide serait une erreur. Mario Cipollini est un vrai bosseur, qui a dû lutter pour en arriver à ce niveau de performances. Et comme tout grand coureur, Cipo a dû faire face à quelques suspicions de dopage. Ami avec le sulfureux Dr Ferrari, il se contentera de répondre que « ces gens ne connaissent rien à la douleur du vélo ». Bête médiatique certes, belle gueule légendaire, mais surtout un super coureur cycliste au palmarès envié par tout un peloton italien qui semble aujourd'hui pécher pour prendre la relève du Roi Lion.