L’artisan de certains des plus gros sauts de snowboard nous explique son métier

FYI.

This story is over 5 years old.

Commandité

L’artisan de certains des plus gros sauts de snowboard nous explique son métier

La construction d’un snowpark requiert non seulement une quantité incroyable de neige, mais aussi la coopération de dame Nature.

Cet article fait partie de la série « Les vraies affaires » .

L'une des figures de planche à neige les plus difficiles dans l'arsenal de Maxence Parrot, c'est le half-cab quadruple backflip. Il s'agit de quatre rotations verticales inversées avant de (si possible) réussir l'atterrissage.

En 2015, le triple champion des X Games et membre de l'équipe olympique canadienne en 2014 l'a réussie, triomphant avec aisance ou presque de la gravité. Pour ceux qui façonnent et sculptent la neige pour que des planchistes comme Maxence puissent accomplir des prouesses démentes comme celle-là, l'adversaire est différent : il s'agit de la météo. Chaque année, toute la neige tombée du ciel se change en eau; cette fatalité représente un défi perpétuel pour ceux qui sont à pied d'œuvre dans les quelque 275 centres de ski au Canada.

Publicité

René Caza est le copropriétaire de Today's Parks, une entreprise basée à Montréal qui conçoit et construit des snowparks et de gros sauts dans les centres de ski au Québec et au Nouveau-Brunswick. En 2014, Today's Parks a conçu et construit les sauts pour Ride Shakedown à St Sauveur, où Parrot a été finaliste. Pour M. Caza, qui a aujourd'hui 30 ans, la construction de ces modules a d'abord été un passe-temps auquel il s'adonnait par plaisir. Le Sherbrookois d'origine a commencé à construire des sauts en 2003 au mont Orford et à Bromont dans les Cantons-de-l'Est. Après avoir obtenu son diplôme universitaire en marketing, il était convaincu de la viabilité de son projet d'aider les planchistes comme Maxence, ainsi que la légion de futurs Maxence, à s'envoler.

Photo : Today's Parks

L'an dernier, ses dix employés ont construit 12 snowparks et réalisé des sauts pour 15 événements, tous concentrés dans quatre froids mois d'hiver. « Notre plus grande difficulté, c'est d'être complètement dépendants de la météo, dit Caza. On est en constante instabilité. Des années, on commence en novembre, et d'autres on doit attendre jusqu'en janvier. La charge de travail est toujours la même; ce qui change, c'est le temps que nous avons. »

La construction d'un snowpark requiert non seulement une quantité incroyable de neige – plus de 50 000 mètres cubes –, mais aussi la coopération de dame Nature. Les canons à neige peuvent compenser ce qui ne tombe pas du ciel, mais des températures constamment au-dessous de zéro sont essentielles. Quand ce n'est pas le cas, comme lors du doux hiver de 2016, il y a une surcharge de travail d'entretien pour l'entreprise. « On n'a pas besoin de neige, on a besoin de froid », ajoute Caza.

Publicité

Beaucoup d'industries doivent s'adapter à la météo parfois schizophrénique du Canada. Des chaînes de crèmeries comme Dairy Queen ferment leurs portes quand la température chute. Les camions de bouffe, maintenant nombreux partout au pays, font leurs recettes seulement dans les quelques mois du printemps et de l'été. De même, l'agriculture et la pêche comptent sur les travailleurs saisonniers, qui représentent autour de 3 % de la main-d'œuvre au pays; le plus haut pourcentage est bien sûr celui des Maritimes.

Photo : Today's Parks

Au Québec, au moins, beaucoup de propriétaires de camions de bouffe continuent leurs activités à l'intérieur au cours de l'hiver, ne serait-ce que pour maintenir leurs revenus. Beaucoup de Dairy Queen servent maintenant du fast-food et les entreprises d'aménagement paysager offrent le déneigement au cours de l'hiver.

Il n'y a pas de plans comme ceux-là en saison morte pour Today's Parks, qui reste fier de son modèle d'affaires « festin ou famine ». Tous sauf trois de ses employés font autre chose le reste de l'année; la plupart travaillent dans la construction. Caza et ses partenaires, quant à eux, sont trop occupés à planifier le prochain hier pour penser à quoi que ce soit d'autre.

« On n'a pas de plan B si ou quand la saison n'est pas bonne. La charge de travail est la même qu'il fasse 10 degrés ou – 40. Notre stratégie, c'est de travailler comme des fous quand l'hiver arrive », poursuit M. Caza.

Publicité

Photo : Today's Parks

L'avantage d'une industrie saisonnière, c'est l'intérêt croissant des employés pour ce que ces emplois peuvent offrir. Un récent sondage de la Society for Human Resource, un organisme américain, montre que le travail saisonnier attire les milléniaux. La raison est simple : ces emplois sont flexibles tout en procurant généralement suffisamment d'heures de travail. Ils sont aussi disponibles en grand nombre comparativement aux emplois à plein temps.

Le camion de bouffe peut souhaiter des ciels bleus et des températures élevées. Pour Caza, les meilleures journées, c'est quand il fait – 30° et que la neige tassée devient aussi dur que du béton. On peut alors créer une surface hyper glissante pour quiconque veut toucher au ciel. « La neige est un beau matériau. Quand la température est basse, on peut la découper, lui donner une forme, la façonner encore et encore. Tout ce dont on a besoin, c'est de l'imagination. »

Et quelques dos solides.

Cet article a été publié grâce au soutien de la Banque Nationale.