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Sports

Non, Julien Faubert n'est pas totalement perdu pour le football

Depuis son passage au Real Madrid, où il a squatté le banc de touche, l'ancien Cannois a enchaîné les clubs et joue aujourd'hui en Finlande.
Susana Vera, Reuters
Le mythe de la sieste

En 2009, le Real Madrid traversait un moment difficile, tant dans les tribunes que sur le banc. Lors de ses derniers instants en tant que président, Ramon Calderon a décidé de changer d'entraîneur – Juande Ramos a ainsi succédé à Bernd Schuster – et de renforcer l'équipe en signant trois joueurs lors du mercato d'hiver : Lassana Diarra, Klaas-Jan Huntelaar ainsi que le héros de cette magnifique histoire, Julien Faubert.

Faubert est arrivé au Real propulsé par une série de succès inexplicables, aussi improbables que sa signature chez les Merengue.

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Faubert, présenté par Alfredo Di Stéfano en février 2009. Photo Susana Vera, Reuters

La véritable cible du Real pendant ce mercato d'hiver était Antonio Valencia, qui a terminé à Manchester United. Le Français arrivait de West Ham United où il avait joué contre le Tottenham de Ramos. Les Anglais ont prêté le joueur pour 1,5 millions d'euros jusqu'à la fin de la saison avec une option d'achat de 6 millions.

« Nous nous trouvions dans l'hôtel, à attendre, attendre, attendre et à se dire : "J'espère que les négociations avec Valencia vont mal se passer". À la fin de la journée ils nous ont dit : "On en a marre de Valencia, ils nous demandent 35 millions, du coup on a signé Julien" », a révélé il y a quelques temps Yvan Le Mée, l'ancien agent de Faubert. Aujourd'hui, personne ne sait qui a eu le dernier mot, car ni Predrag Mijatovic ni Vicente Boluda, ni Juande Ramos n'en ont assumé la responsabilité.

Le fait est que, sur le coup, cela ressemblait à un pari de dernière minute, un de ceux qui peut, en quelques minutes, couvrir de gloire ou de ridicule celui qui en est à l'origine. À 25 ans, au sommet de sa carrière, ce Français inconnu de tous – à la probable exception de Maldini et de quelques autres malades du ballon – atterrissait au Bernabéu, littéralement le stade de ses rêves.

Julien Faubert lors de ses débuts avec le Real. Photo de Susana Vera, Reuters

Les doutes sur ses qualités de footballeur n'ont pas tardé à se confirmer. Au Real, Faubert a seulement joué 54 minutes réparties sur deux matches de liga. C'est tout, pas une de plus. Le seul commentaire de Juande Ramos après ses débuts contre le Racing Santander le 7 février a été dévastateur : « Faubert a été fade ». Il n'est retourné sur la pelouse qu'à une seule autre occasion, lors d'un match déjà plié contre l'Athletic de Bilbao (où les Merengue menaient 5 buts à 2).

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Malgré ses tristes antécédents, le latéral droit est devenu un mythe pour les supporters du Madrid – je dirais même plus une légende universelle – après avoir réalisé la sieste la plus célèbre jamais faite sur un terrain. Contre Villarreal, dans les agréables fauteuils du banc de touche de l'El Madrigal, Faubert s'est autorisé le luxe de piquer un petit roupillon.

S'agissait-il d'un match ennuyeux, insignifiant ? Même pas. Ce jour-là, en perdant 3-2, le Real a mathématiquement perdu la possibilité de voler le titre au FC Barcelone qui commençait tout juste à goûter les fruits de l'ère Guardiola. « J'ai fermé les yeux pendant à peine deux secondes ! Mais le journaliste a écrit que je m'étais endormi… », se justifie le joueur lors d'une interview pour le Diario AS. Dans un autre entretien, cependant, il estime le temps de son petit somme à 10 secondes.

Il est plus vraisemblable que Faubert n'ait pas réellement dormi, et que la presse en ait fait des tonnes comme souvent, mais en plus de se taper des barres avec Royson Drenthe – un personnage lui aussi – le type faisait preuve d'une apathie absolue avant une rencontre décisive pour son équipe.

Sa petite sieste, ajoutée au fait qu'il ait manqué un entraînement parce qu'il croyait avoir son week-end et une blessure imaginaire ont été les grands exploits de son bref passage dans la capitale espagnole. Mais Faubert arrivait de loin.

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En France et en Angleterre, Faubert a vécu ses meilleures années de footballeur. Photo de Regis Duvignau, Reuters

Héritier de Zizou, héros de Martinique

Élevé dans le centre de formation de l'AS Cannes, où ont également été formées des stars comme Micoud, Vieira ou Zidane, Faubert a vécu une progression prometteuse en Ligue 1. En 2006, lors d'un match amical contre la Bosnie-Herzégovine, le latéral polyvalent – reconverti en ailier à l'occasion – a eu sa première et unique opportunité en sélection.

Et il n'a pas manqué sa chance de se faire remarquer après avoir remplacé Ribéry à la 69ème minute et en marquant lors du temps additionnel donnant ainsi la victoire aux Français. Malgré ses bons débuts sur le terrain, Julien s'est de nouveau fait remarquer pour un fait autre que son toucher de ballon.

Lorsqu'il est entré sur le terrain, en tant que numéro 10, il est devenu le premier joueur français à porter le maillot de Zizou depuis son départ à la retraite. « C'est le seul maillot qu'il restait », expliquera-t-il plus tard. Bien qu'il n'ait jamais rejoué et ne rejouera jamais en équipe de France, son nom restera aux côtés des plus grands numéro 10 des Bleus.

Julien Faubert reçoit les félicitations de Thierry Henry et du reste de l'équipe. Photo de Damir Sagolj, Reuters

Heureusement, la vie nous donne toujours une seconde chance, et Julien a eu la sienne en changeant d'air pour aller défendre les couleurs d'une minuscule région française. En Martinique, Faubert a retrouvé le goût du football international et, mine de rien, s'est ajouté à la liste sélecte – incluant Di Stéfano, Kubala, Puskas ou Platini – des joueurs qui ont joué pour au moins deux sélections nationales.

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Lors de ses débuts avec les insulaires, Faubert a bien sûr de nouveau brillé. Titulaire indiscutable, le Français a réussi à qualifier sa nouvelle sélection pour la phase finale de la Coupe des Caraïbes et la Copa de Oro 2017, qui sera jouée aux états-Unis.

Malgré son échec retentissant à Madrid, Julien n'a jamais perdu le sens de l'humour. « La presse et mes amis se moquaient, mais ce qui est sûr c'est qu'il n'y a pas beaucoup de joueurs qui peuvent se targuer d'avoir été courtisé par un tel club. C'est l'une des meilleures équipes du monde et l'expérience a été incroyable. J'ai joué avec Fabio Cannavaro, Michel Salgado, Raul, Guti. La qualité de cette équipe était dingue », assure-t-il dans une interview récente avec la chaîne britannique Sky Sports.

De la troisième division à la Finlande

Après être retourné à West Ham en 2010, la cote de Faubert n'a cessé de baisser. En 2012, il a quitté la Premier League pour aller gagner sa croûte chez des équipes turques, mais son aventure avec le Sanica Boru Elazığspor n'a duré qu'une saison. De retour en France, à Bordeaux, Julien a retrouvé quelques sensations de son meilleur football, qui l'ont mené vers son aventure espagnole.

Après ne pas avoir renouvelé son contrat en France, Faubert s'est retrouvé à 32 ans sans équipe et a fait joueer sa famille et ses amis pour trouver une solution à sa situation. « Ma femme est de Castelldefels, et grâce à un ami, nous avons discuté avec l'entraîneur du CF Gavà qui m'a ouvert les portes du club », a-t-il expliqué au Diario AS. En cinq ans, Julien est passé par quelques-uns des meilleurs clubs du monde pour s'entraîner et rester en forme physique.

En 2016, il s'est essayé chez deux équipes écossaises, St Johnstone et Kilmanrock. « Nous avons jugé que nous ne pouvions pas attendre qu'il se remette en forme pour jouer des matches », juge l'entraîneur de St Johnstone avant de se séparer de lui. Avec Kilmanrock, l'aventure a duré neuf matches, mais aujourd'hui, Faubert a rencontré son énième opportunité…en Finlande, avec l'avant- dernier d'une des ligues les plus tranquilles du continent européen.

« Je veux gagner des matches et des titres, c'est mon objectif, a expliqué Faubert pendant sa présentation avec le FC Inter Türku. Je sais être un meneur sur le terrain. J'ai beaucoup d'expérience de différents pays et compétitions. Je crois être capable d'aider les plus jeunes grâce à mon expérience ». L'entraîneur du Türku a confirmé que Julien assurera bien le rôle de sauveur de l'équipe.

Quelle sort le futur réserve-t-il à Julien ? Remplira-t-il son rôle en Finlande ? Mieux vaut ne pas s'endormir sur ses lauriers, de peur de les perdre.