FYI.

This story is over 5 years old.

Sports

Le nouveau combat de Yohan Fort, champion du monde de roller

Cloué dans un fauteuil roulant à la suite d'une inflammation des vaisseaux sanguins, le Bordelais combat la maladie avec la même hargne qu'en compétition.

« Quand tu es en fauteuil roulant, que tu te vois chaque jour dans la glace et que tu te dis "putain, il y a 4 mois, j'étais champion du monde de roller". Tu prends un sacré coup sur la tête ! » A 24 ans, le pro rider Yohan Fort a une histoire de vie peu commune. Ce Bordelais, qui arpentait déjà le bitume à 4 piges, un âge où beaucoup de minots squattent encore le bac à sable, doit en effet lutter depuis 2013 contre la maladie. En l'occurrence une vascularite, autrement dit une inflammation des muscles et des vaisseaux sanguins. Et cette maladie auto-immune se révèle beaucoup plus redoutable que son nom ne le laisserait penser.

Publicité

« Cela m'empêche clairement de marcher, je reçois comme des décharges dans les jambes, cela me tétanise. C'est un combat de tous les jours, une compétition en tant que telle », lance Yohan qui a su trouver, en novembre dernier, les ressources pour aller cueillir à Wuyishan (Chine) son premier titre mondial, dans la discipline du skate cross. Une sorte de course d'obstacles en roller, lui qui cumule également cinq couronnes mondiales en slalom de vitesse, 27 titres de champion de France et 3 titres européens. « Lors de la finale du championnat du monde 2015, je sortais tout juste de chimio et j'ai gagné. C'est une preuve pour les autres malades que tout est possible. Les médecins m'avaient dit que j'allais avoir du mal à reprendre le roller, je me suis accroché et j'ai adapté mon rythme d'entraînement à mon état de forme. Mon mental de compétiteur m'a aidé », confie Yohan Fort.

Fort dans sa tête, le jeu de mots est facile mais il reflète bien l'état d'esprit de cet as du patin à roulettes. « J'ai découvert très jeune ce sport, il faut dire qu'à l'âge de 4 ans, je ne pouvais pratiquer que le roller ! J'ai débuté par le street, j'ai ensuite bifurqué vers le freestyle. Au fur et à mesure des années, je me suis spécialisé dans le slalom de vitesse », explique l'intéressé. Une discipline exigeante, pour laquelle le rider du club Skate Machin' Arsacaise a un coup de foudre immédiat. « On peut comparer le slalom de vitesse en roller à un sprint en athlétisme. On doit zigzaguer entre 20 plots espacés de 80 centimètres, chaque cône renversé ajoutant deux dixièmes de secondes à notre chrono. Il faut être tonique, réactif, avoir la hargne et en vouloir plus que son adversaire », détaille Yohan Fort. Une hargne qu'il met aujourd'hui à profit pour le combat de sa vie, celui contre la vascularite. « Mon objectif prioritaire est de combattre cette putain de maladie, de montrer aux gens que je suis capable de revenir à mon meilleur niveau. Cela ne sert à rien de baisser les bras, même en ayant un tel handicap, il faut se donner les moyens d'aller mieux », livre ce fan du boxeur Mike Tyson.

Yohan a appris qu'il souffrait de cette grave maladie qu'est la vascularite au retour d'une compétition à Moscou (Russie), « Quand j'ai su que j'étais touché par la vascularite, j'étais au fond du trou, je ne pouvais plus marcher du tout et je me suis retrouvé en fauteuil roulant, sous perfusions. Heureusement que mes amis et ma famille étaient là pour me soutenir, qu'ils ne m'ont pas jugé. J'entendais des bruits dans le milieu du roller : "Yohan est malade, il ne pourra plus gagner, c'est fini pour lui" ». Il cogite, se demande s'il pourra marcher de nouveau ou s'il devra prendre place sur un fauteuil pour le reste de sa vie. Il se renseigne même sur les clubs de handi fauteuil, car il n'imagine pas sa vie sans sport.

Pudique, le jeune homme n'insiste pas sur ces blessures morales, mais on devine au ton de sa voix que les cicatrices sont encore là. Yohan Fort a pourtant surmonté ces obstacles en vrai champion. « J'ai fait un peu le guerrier, j'ai refusé de baisser les bras et j'ai eu envie de prouver aux autres que même malade, on peut toujours s'en sortir. Pour relever la tête, je me suis fixé des objectifs quotidiens, c'était une compétition de tous les jours durant 3 ans, qui se poursuit encore aujourd'hui. »