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Sports

La Russie exploite des ouvriers nord-coréens sur les chantiers de la Coupe du monde 2018

Après les ouvriers népalais et indiens en situation de quasi-esclavage au Qatar, la Russie offre un nouvel exemple de ce que le foot-business peut comporter de pire.

Voilà des mois que les ONG du monde entier, Amnesty International en tête, dénoncent les conditions de travail inhumaines dans lesquelles se retrouvent les milliers d'ouvriers venus d'Asie du sud-est (principalement d'Inde, du Bangladesh et du Népal) employés sur les chantiers pharaoniques du Qatar en vue de la tenue de la Coupe du monde 2022 dans l'émirat pétrolier.

Mais à presque quelques jours de l'ouverture de la Coupe des Confédérations et à un an pile du début de la Coupe du monde 2018, le Qatar se fait voler la vedette par la Russie en termes d'exploitation ouvrière et de gabegie footballistique. Selon une enquête du quotidien britannique The Guardian, le stade de Saint-Pétersbourg, qui héberge le club du Zenit et qui accueillera le match d'ouverture de la Coupe des Confédérations, a été construit en grande partie par des migrants venus d'Asie, dont toute une colonie de Nord-Coréens.

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Selon une source anonyme, au moins 190 ouvriers venus du régime de Pyongyang ont travaillé sur le chantier, ne comptant pas leurs heures et encore moins leurs jours de repos puisqu'ils ont travaillé en continu d'août à novembre. Un rythme effréné aux conséquences dramatiques puisqu'un homme âgé de 47 ans est mort sur le site des travaux d'une crise cardiaque dont on soupçonne qu'elle soit due à une fatigue extrême. Pour cette source que le journal anglais a pu contacter, les ouvriers sont « comme des prisonniers de guerre ».

Mieux encore, selon une agence spécialisée en immigration économique qui s'est chargée de faire venir les travailleurs en Russie, les Nord-Coréens employés sur le chantier doivent reverser une partie de leur salaire au régime. Une sorte de participation à l'effort de défense nationale et au programme de recherche nucléaire.

Selon Marzuki Darusman, le rapporteur spécial des Nations Unies pour les Droits de l'Homme en Corée du Nord, des dizaines de milliers d'ouvriers venus de cette dictature extrême-orientale travaillent actuellement en Russe « dans des conditions proches de l'esclavage, ce qui fait des compagnies qui les embauchent des complices de cette exploitation et de ce système de travail forcé. »

D'un point de vue légal, en 2013, la Russie a adopté une loi plus que "libérale" puisqu'elle permet aux employeurs liés aux travaux de la Coupe du monde de ne pas respecter le droit du travail. Pas très rassurant en terme de confort social, encore moins en terme de respect des Droits de l'Homme. De son côté, la FIFA s'en est sortie par une pirouette dont elle a le secret, assurant qu'elle surveillait les conditions de travail des ouvriers impliqués sur ces chantiers et qu'elle « continuerait à suivre avec attention les accusations de violation des Droits de l'Homme. » Les ouvriers nord-coréens peuvent pousser un ouf de soulagement et dormir sur leurs deux oreilles.

En attendant, le comité de suivi du chantier de Saint-Petersbourg assure qu'ils travaillent 7 jours sur 7 et 11 heures par jour pour un salaire quotidien de 10 à 15$, le tout en vivant à six ou huit dans une baraque de chantier. Selon The Observer, cela fait plusieurs années qu'ils supportent ces conditions. Cinq personnes au moins seraient mortes depuis 2015.

Plus largement, la Corée du Nord envoie des travailleurs en Russie depuis la période soviétique. La chute de l'URSS n'a pas mis fin à cette tradition, bien au contraire. Dans The Observer, Choi Myong-bok, un ancien travailleur nord-coréen parti travailler dans l'est de la Russie en 2002, décrit « un enfer sur terre, une prison à ciel ouvert », où les ouvriers étaient « surveillés en permanence, dormaient dans des lits infestés de puces de lit et se nourrissaient de neige, de riz, de sel, de baies et des quelques champignons qu'ils trouvaient. »

Selon The Guardian, la Corée du Nord empoche plus de deux milliards d'euros chaque année grâce à son contingent de travailleurs exilés en Russie. En 2015, ils étaient près de 30 000.