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On a interviewé le mec qui t'apprend à lancer des couteaux sur YouTube

Guillaume Henry, aka L'Abeille métallique, fait des tutos vidéos de lancer de couteaux, une discipline qui commence à avoir pas mal d'adeptes en France.
Capture d'écran YouTube

Qui n'a jamais rêvé de passer ses journées à lancer des schlass à 50 km/h sur des cibles en bois tout en se donnant des noms d'Indien ? Guillaume Henry ("L'Abeille métallique" sur YouTube), 28 ans et un pas de tir dans son jardin du côté de Bayonne, a décidé d'arrêter de rêver et de mettre ça en pratique. Depuis un an et demi, il aiguise ainsi sa passion du lancer de couteaux, tout en la documentant via sa chaîne YouTube où vous pourrez apprendre vous aussi la technique du no spin en lancer instinctif grâce à des tutoriels chiadés.

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Du coup, comme il n'y a rien de plus passionnant que d'écouter des passionnés, on a posé quelques questions à Guillaume sur ses couteaux préférés, les trucs qu'il préférait défoncer et sur ces Français qui aiment lancer des couteaux, en général.

VICE Sport : Salut Guillaume, pour commencer, question toute conne : comment en arrive-t-on à devenir passionné de lancer de couteaux ?
Guillaume Henry : En fait, j'aimais bien les couteaux à la base mais je m'étais jamais trop attardé sur le sujet. Et puis, comme je suis vidéaste et photographe de profession, j'ai été amené à rencontrer une personne qui voulait faire une vidéo pédago, Michel Dujay (qui se fait lui appeler Bison fou, ndlr), quelqu'un d'assez connu dans le milieu. Il a été à l'origine de pas mal d'initiatives, il a notamment été le premier à organiser une compétition française de lancer de couteaux. Il voulait refaire une vidéo pédagogique après avoir déjà fait une VHS par le passé.

Il le pratiquait comme artiste à la base, avec des spectacles de lancer de couteaux. Je l'ai donc rencontré pour cette vidéo. Il m'a appris, et depuis, j'ai mis des cibles dans mon jardin. J'ai commencé il y a un an et demi.

J'essaie de m'entraîner un peu tous les jours quand le temps le permet. Au moins une ou deux fois par semaine quand il fait mauvais temps, comme en ce moment. C'est surtout histoire de ne pas perdre la gestuelle.

C'est quoi du coup la bonne gestuelle pour lancer des couteaux ?
Il y a deux grandes écoles dans le lancer de couteaux. Le lancer conventionnel, pratiqué souvent par les Américains, voire par la majorité des lanceurs. Ça consiste à connaître le nombre de rotations de son couteau et maîtriser précisément les distances où il va faire des tours, et donc de rester bloqué à ces distances. C'est un peu comme les lanceurs du cirque ou ce qu'on voit dans les films.

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Et puis, il y a le lancer instinctif, dans lequel je me suis spécialisé, qui est plus en vogue en Europe de l'Est ou en Asie. Ça consiste à lancer avec les mêmes rotations peu importe la distance. C'est ce que je fais. Je pratique aussi le lancer no spin, c'est-à-dire sans rotation, droit vers la cible. Une technique très difficile. En réalité, le couteau effectue une rotation mais très lente, d'un quart de tour, avant d'atteindre la cible. C'est une pratique qui est en train de se démocratiser.

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Pour avoir un ordre d'idée, ça représente combien de personnes la communauté des lanceurs de couteaux en France ?
Il doit y avoir à peu près 300 inscrits dans des clubs à travers toute la France, mais il y a aussi beaucoup de lanceurs isolés, qui lancent avec des amis. Donc c'est un peu difficile de comptabiliser. On doit être plusieurs centaines au total. C'est plutôt pas mal.

Aux derniers championnats de France, il devait y avoir 70-80 participants, avec 10 à 20% de femmes. Il y a même eu des championnats du monde en France, en Bretagne en 2014, à Callac-de-Bretagne. Ça bouge pas mal, il y a des clubs qui se sont montés, une association nationale, qui s'appelle "Fédération française de lancer de couteaux".

Et parmi les lanceurs, il y a plusieurs types de personnes : des archers par exemple, qui aiment le sport de précision en général. Et il y en a pour qui ça a été un coup de coeur, comme moi. J'ai essayé de contaminer mes amis, quelques-uns m'ont suivi. Mon objectif, c'est d'ailleurs de monter un club dans le futur.

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Ils trouvent pas ça un peu chelou d'ailleurs tes potes quand tu leur expliques ta passion ?
C'est sûr ça interpelle quand je dis que je suis lanceur de couteaux. Mais tous les gens qui viennent chez moi, ils ont droit à leur session lancer de couteaux. On arrive vite à se faire plaisir quand on débute en plus.

Pourquoi une chaîne YouTube ?
A la base, j'ai une autre chaîne YouTube avec des vidéos en rapport avec mon métier, la vidéographie. Bon, ça marche pas beaucoup. Mais dans la communauté des lanceurs de couteaux, il y a beaucoup de monde qui partage des vidéos, généralement pour se faire conseiller sur leurs gestes. Après j'ai fait des vidéos d'une qualité un peu meilleure, des tutos… Là, j'ai atteint les 400 abonnés et les 20 500 vues, c'est pas mal pour la communauté des lanceurs de couteaux. C'est un monde qui fonctionne beaucoup par la vidéo et les groupes Facebook de manière générale.

J'ai l'impression qu'il y a aussi tout un folklore très américain autour du lancer de couteaux, c'est dû à quoi ?
Ouais, les Etats-Unis aussi sont très portés sur le lancer de couteaux. Ils ont leur ligue et des règles différentes des règles européennes, mais ils viennent lancer ici aussi, et ils se conforment à nos règles. Mais je ne me suis pas spécialement penché sur le côté historique du lancer de couteaux. Je sais qu'il y avait un dérivé dans les jeux du cirque, d'ailleurs certains pensent que ça se résume à ça. Mais c'est devenu une discipline à part entière.

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C'est une discipline très populaire en Europe de l'Est surtout, en Russie, République Tchèque, Allemagne. Au Japon aussi, il y a cette culture-là avec les shurikens et une approche très sérieuse. C'est un art martial.

T'en lances aussi des shurikens ? J'ai vu que dans tes vidéos tu t'essayais à pas mal de trucs différents, l'arbalète, l'arc…
Je lance un peu de tout. Une fois qu'on a appris la technique, on teste avec d'autres trucs. Après j'ai mon couteau préféré, c'est un couteau inspiré des couteaux russes, l'Osetr. Un couteau dans la forme des couteaux utilitaires, assez trapu, plus petit que les couteaux américains.

En tout, j'ai une trentaine de couteaux. J'en ai acheté pas mal dans le commerce, sur des armureries en ligne. Et puis j'ai des vrais couteaux de lancer, achetés à des forgerons artisanaux. Six, exactement : trois achetés à un Tchèque, et trois depuis les Etats-Unis.

Mais à terme, je voudrais fabriquer mes propres couteaux. J'en ai déjà fait par enlèvement de matière, avec une barre d'acier. Mais l'objectif, ce serait de les forger.

Dans tous les championnats, il y a aussi du lancer de haches. C'est plus simple que le couteau, il n'y a qu'une façon de les lancer. Mais c'est plus facile de s'esquinter l'épaule aussi.

D'ailleurs ça demande un entraînement spécifique de lancer des couteaux ?
Il faut bien s'échauffer le bras, c'est tout. Mais il y a toujours un risque de déséquilibre, à part chez les ambidextres, vu qu'on utilise qu'un seul bras. Les vieux lanceurs sont comme les vieux tennismen, ils sont tous déséquilibrés.

Ça t'apporte quoi finalement dans la vie de tous les jours ?
Moi, j'y vois une sorte de méditation : quand je lance des couteaux, je suis dans mon truc, je pense à rien d'autre. C'est comme la pratique d'un art martial. Cela demande un entraînement, une maîtrise de soi.

Y en a qui l'envisage comme une méthode d'auto-défense mais c'est pas du tout mon cas. Il y a forcément différentes mentalités dans cette communauté-là. Bon, en France on n'a pas le droit, mais chez les Russes, les Tchèques, les Américains, qui peuvent porter leur couteau à la ceinture, il y a ce truc de se dire : « Je pourrais l'utiliser si je veux me défendre ». Vu comment un couteau se plante dans du bois, j'imagine même pas dans un crâne.

Tu lances jamais des couteaux sur des photos de gens que t'aimes pas ? Histoire de libérer un peu de colère enfouie ?
J'ai jamais fait ça, mais régulièrement j'essaie d'exploser des trucs, c'est toujours marrant. On lance jamais sur des arbres par contre, c'est une des règles qu'on a chez les lanceurs de couteaux. Parce que c'est un monde de gens de la nature, donc on essaie de la respecter.

C'est quoi le truc le plus drôle à exploser du coup ?
Le plus impressionnant, ça reste quand même quand tu fends une cible en bois en deux.