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Football

Pourquoi l’équipe féminine du Cameroun aurait pu ne jamais jouer contre la France

Une sombre histoire de visas a bien failli coûter le match à la sélection féminine de football du Cameroun, qui affronte la France ce soir en match amical (21H).
Glyn Kirk / AFP 

À quelques heures près, sept joueuses, l’ensemble du staff technique et médical et quelques accompagnateurs ne montaient pas dans le vol Air France qui a quitté Yaoundé hier soir un peu avant minuit. La délégation a finalement atterri à l’aéroport Charles-de-Gaulle ce mardi aux aurores. Les Camerounaises ont ensuite rejoint Grenoble, à près de 650 kilomètres de là, et si possible rapidement, en vue du match amical face à la France qui se joue ce soir. « Sincèrement, préparer de cette façon un match face à la France, une machine de guerre, une des meilleures équipes du monde, ce n’est pas sérieux. On va essayer de bien figurer, de faire en sorte que ça ne tourne pas au ridicule », a grincé Joseph Ndocko, le sélectionneur des Lionnes.

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Les derniers visas nécessaires à l’autorisation de pénétrer sur le territoire français n’ont été validés que hier après-midi. Les dossiers des vingt-deux membres de la délégation camerounaise avaient été déposés à l’ambassade de France à Yaoundé le mercredi 3 octobre. « On nous a répondu que les services consulaires ne pouvaient pas traiter plus de six dossiers par jour. Je peux comprendre que l’ambassade avait d’autres demandes de visas que les nôtres à traiter. Mais nous étions invités par la Fédération française de football (FFF) pour ce match amical. Que se serait-il passé si nos visas n’avaient pas été accordés dans les temps ? Eh bien, on ne se déplaçait pas, et la France ne disputait pas de match amical », poursuit Ndocko. Le technicien camerounais aurait apprécié que les services de l’ambassade de France se montrent un peu moins tatillons, « afin de ne pas mettre en péril l’organisation de la rencontre. »

Mais Ndocko était surtout étonné, pour ne pas dire plus, par la gestion chaotique de ce dossier par la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT), qui a fait preuve d’une certaine légèreté. « On a un peu l’habitude ici, mais je pense qu’il fallait s’y prendre plus tôt pour déposer la demande de visas. Il y avait vingt-deux demandes à traiter, des vérifications à faire. On a souvent tendance à faire les choses en urgence, et là, cela aurait pu nous coûter cher. À un moment donné, je me suis dit que ce n’était plus la peine d’aller en France. Partir la veille d’un match, arriver en pleine nuit après un long vol, puis se rendre à Grenoble en urgence, cela fait beaucoup. On ne peut pas bien préparer un rendez-vous dans ces conditions », a-t-il expliqué. Les joueuses locales, fatiguées nerveusement et physiquement par les longues heures d’attentes et le voyage nocturne ne seront évidemment pas au meilleur de leur forme pour affronter les Françaises ce soir, et n'ont pas souhaité s'exprimer. Cela inquiète forcément Ndocko. « Elles sont fatiguées, mais certaines d’entre elles vont débuter le match. Je n’ai pas le choix. »

Si onze internationales évoluant en Europe étaient déjà à Grenoble depuis la fin du week-end, elles étaient sans réel programme d’entraînement puisque leur sélectionneur était encore bloqué à Yaoundé. Les joueuses concernées ont malgré tout pu travailler un peu, puisque deux entraîneurs camerounais exerçant dans l’Isère ont pu briser la monotonie de l’attente en organisant quelques séances. « Vous allez me dire que je pourrais titulariser ces onze filles. Mais je ne peux pas, car il faut que l’équipe soit équilibrée. Mes gardiennes jouent au Cameroun, par exemple, et elles font partie de la délégation qui a quitté Yaoundé mardi », poursuit Ndocko. Les Lionnes, qui préparent la CAN 2018 (17 novembre-1er décembre au Ghana) et qui qualifiera quatre équipes pour la Coupe du Monde 2019 en France, se souviendront longtemps de cette préparation indigne d’une sélection nationale. « J’espère que cet épisode sera le dernier de ce genre et que la prochaine fois que nous nous déplacerons, ce sera mieux organisé. » Malheureusement, les problèmes qui rongent le football africain depuis des dizaines d’années (affaires de primes, de visas, etc) ne risquent pas de s’arrêter de si tôt, et cette nouvelle déconvenue en est la preuve.

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