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« Une insulte faite à notre pays » : quand le Milan AC et Nivea parodient le haka

Avant un match de Serie A il y a deux semaines, des acteurs déguisés en joueurs du Milan AC ont parodié le haka pour la marque Nivea. Cela a provoqué la colère de quelques Maoris qui nous expliquent ce qui leur a déplu.
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Ce papier a été publié au préalable sur VICE Sports Australie & Nouvelle-Zélande.

Il y a deux semaines, avant un match de Serie A entre le Milan AC et Capri, une douzaine de personnes sont rentrées sur le terrain avec des maillots de Milan et ont commencé à faire une version un peu bâtarde du haka, la traditionnelle danse de guerre maorie. Les danseurs - qui étaient des acteurs pour une campagne marketing de la marque de cosmétiques Nivea - balançaient leurs bras en l'air, se frottaient les aisselles, et criaient des truc qui ne voulaient rien dire pour singer le fameux rituel des rugbymen néo-zélandais.

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Instantanément, les gens sur les réseaux sociaux ont marqué leur désapprobation, dont beaucoup de Néo-Zélandais comme la légende Sir John Kirwan.

« Je pense que c'est une insulte faite à notre pays, a déclaré Kirwan. J'ai regardé 30 secondes avant d'éteindre. J'étais très déçu et j'ai pensé que c'était embarrassant de la part d'un club comme le Milan AC. »

Kirwan, qui a joué 63 test matches pour les All Blacks, a aussi coaché l'équipe nationale italienne au début des années 2000. Il continue de passer beaucoup de temps en Italie. Le problème, dit-il, c'est qu'il s'agit d'une multinationale qui utilise des traditions culturelles pour faire du marketing.

« Les Italiens sont très respectueux, et ils respectent vraiment notre culture, déclare-t-il. Ils comprennent que lorsque nous faisons le haka, nous représentons notre pays. Je pense que je n'achèterais plus jamais de produits Nivea. Une entreprise a des responsabilités, et qu'une compagnie comme celle-là ne montre aucun respect pour la Nouvelle-Zélande et notre culture… Où est la limite ? »

Ni le Milan AC ni Nivea n'ont souhaité répondre à nos questions, il est donc assez difficile de savoir s'ils ont consulté des représentants maoris avant de faire leur opération marketing. Mais ce ne serait pas la première fois que des groupes de gens sont critiqués pour avoir fait le haka. L'année dernière pendant la Coupe du monde de rugby, l'équipe d'Angleterre a été démolie pour avoir créé la "hakarena", un mélange de haka et de Macarena. D'autres, comme le club d'Everton, les Spice Girls ou des entreprises comme Fiat et Coca-Cola, ont aussi été sous le feu des critiques pour avoir fait leurs propres versions de la danse.

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Même en Nouvelle-Zélande, des détournements du haka ont causé la controverse. En mai 1979, des membres du groupe d'activistes He Taua demandent ainsi à des élèves d'une école d'ingénieurs d'arrêter de faire leur version bourrée du célèbre haka Ka Mate. Les étudiants ont continué de danser, provoquant une bagarre générale. Quelques étudiants finirent leur journée à l'hôpital avec quelques points de sutures et des fractures. On ne les a plus revus faire de haka après ça.

Pour la plupart des maoris, le problème n'est pas que les gens fassent le haka, mais la manière dont ils le font.

« Je n'ai pas de problèmes avec les gens qui dansent le haka, explique ainsi le présentateur télé maori et ancien politicien Willie Jackson. Je ne suis pas exclusif, précieux, du genre à dire "C'est à nous et personne ne peut le faire". Souvent, c'est une bonne chose. C'est la reconnaissance de notre culture et de ce que nous faisons. Mais ne le faites pas en le parodiant et en ne sachant pas ce que vous faites. »

Pour Willie Jackson, Nivea exploite le haka.

« Dans le cas présent, je ne pense pas que ce soit acceptable, surtout si vous regardez le côté commercial de la chose. Dans l'industrie musicale, il y a toujours des royalties données aux artistes. Je ne pense pas qu'il y aura des royalties pour les Maoris ici en Nouvelle-Zélande avec ce genre de choses. Ça laisse un sale goût dans la bouche. »

Sir Pita Sharples, un célèbre enseignant et politicien maori, pense, lui, que voir un groupe de petits blancs-becs maigrelets tenter de faire une danse de guerre polynésienne est ridicule et pas assez important pour que cela constitue une insulte culturelle.

« Ce n'est pas notre forme de haka, et cela n'a rien à voir avec nous en vérité, déclare-t-il. C'est une forme burlesque, et s'ils veulent faire ça et avoir l'air stupides à nos yeux, et bien, c'est leur droit. »

Ni Milan ni Nivea n'ont indiqué s'ils allaient continuer leur campagne de publicité avec ce haka. Mais cela n'a pas rendu service à l'équipe ce soir-là : le Milan AC a ainsi fait un 0-0 assez ridicule face au 17e de Serie A. Cela amène donc l'ancien All Black Sir John Kirwan à questionner la pertinence de réitérer ce haka une deuxième fois.

« Est-ce que vous croyez au karma ? », demande-t-il ainsi. « Parce que moi, oui ».